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. UTOPIA : non, Réalité !
" Ce qui n'est pas donné est perdu ."
. Proverbe manouche .
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. Université Populaire du Gout d'Argentan .
Michel Onfray écrivain et philosophe originaire de l'Orne, enseigne la philosphie dans les classes terminales du lycée technique privé Sainte-Ursule de C002. Il démissionne en 2002 pour créer l’Université populaire de Caen afin d'y enseigner une "contre-histoire" de la philosophie. Il en écrit le manifeste en 2004 (La Communauté philosophique).
Puis en octobre 2006 il créé l'Université populaire d'Argentan.
Le philosophe normand prône un athéisme argumenté et militant, qu'il décline au cours de ses conférences à l’Université populaire de Caen.
Il possède plus d'une cinquantaine d'ouvrages à son actif.
Bach BMV 1054 N° 3 D 06 III
ALLEGRO
. Piano Concerto .
°
EXTRAITS :Michel Onfray:
Parodions Paul Gauguin et posons nous trois questions fondamentales –
celles de satoile éponyme aujourd’hui au Musée de Boston (Etats-Unis) :
D’où venons nous ?
Que sommes nous ? Où allons nous ? et précisons ainsi notre identité
argentanaise.
"D’où venons nous ? D’un « jardin ouvrier ». Je persiste à le nommer ainsi
malgré le politiquement
correct de notre époque qui préfère « jardins familiaux », comme si
l’évitement du mot
« ouvrier » assurait la destruction de la chose nommée...
Le jardin ouvrier rassemble des personnes de bonne volonté qui ne savent
pas jardiner sous
la responsabilité de personnes à peine plus au fait de la chose potagère !
Les participants aux
jardins ont eu à souffrir de la brutalité libérale de notre époque et des
violences du marché
libre.
Chômeurs en fin de droit, rmistes, parfois anciens prisonniers, de temps en
temps
buveurs repentis , déclassés sociaux, oubliés des visibilités sociales,
en rupture de ban avec le
monde qui court sa route sans eux, ils arrivent dans cette association pour
repartir d’un
meilleur pied .
Ceux qui les encadrent ont eux aussi subi la loi des licenciements, des mises
à la porte, des délocalisations.
De fait, dans l’équipe encadrante, les diplômes de jardinier ou
d’horticulteur ne sont pas légion ! La municipalité d’Argentan, louons-là
pour cela, a créé
cette association, parmi trois autres, pour panser les blessures politiques et
accompagner ces
femmes et ces hommes destinés à sombrer sinon.
Transformons le Que sommes nous ? en : Qui sommes nous ? .
Puis répondons : un
« intellectuel collectif » pour le formuler dans le vocabulaire de Pierre
Bourdieu.
C'est-à-dire
un assemblage de personnes aux talents différents qui souhaitent fédérer les
bonnes volontés
désireuses d’incarner ce projet politique au sens noble du terme.
Comment ?
En partageant
le savoir et le pouvoir, la connaissance et les informations.
Dispose-t-on d’un savoir ?
A-t-on un pouvoir ?
Alors distribuons ce savoir, utilisons ce pouvoir pour augmenter la
communauté
harmonieuse et produire plus de justice sociale.
A l’origine se trouve la déploration de mon ami Jean-Luc Tabesse qui
préside aux destinées
des associations de réinsertion, dont « Jardins dans la ville ».
Il constate que les gens du
jardin n’ont pas la culture ou l’habitude du légume.
L’épicerie solidaire offre un panier rempli
des produits du jardin et il ne trouve pas preneur.
Face à ce constat nous décidons, Jean-Luc et
moi, de créer une Université Populaire, d’abord sans nom, mais qui devient
vite « du goût ».
Objectif : apprendre à cuisiner, autrement dit : se faire initier à transformer
la nature en
culture, à sublimer un légume du jardin en plat convivial.
Dès lors il nous faut des cuisiniers.
Arrive alors Marc de Champérard, critique gastronomique et auteur du
guide éponyme.
Je m’ouvre à lui de notre désir d’Up du goût. Séduit par le projet, il met
immédiatement à notre
service son immense carnet d’adresses, son amitié et demande à ses amis
cuisiniers haut de
gamme de la gastronomie française de venir à Argentan.
Tous acceptent.
Chacun se charge
d’un légume et de sa déclinaison culinaire effectuée en public :
pour les ouvriers des jardins,
certes, mais aussi pour tous les publics désireux de s’associer au projet.
Début de la
réinsertion pour la douzaine de nouveaux jardiniers : renouer le contact
avec les citoyens
actifs dans la cité.
Pour donner à cette Up du goût sa saveur intellectuelle,
Evelyne Bloch Dano, écrivain,
auteur de belles biographies – l’épouse de Zola, la mère de Marcel Proust, la
socialiste Flora
Tristan -, de textes très empathiques et excellemment documentés sur les
maisons d’écrivain,
agrégée de lettres plusieurs années enseignante au Lycée Mézeray
d’Argentan, récemment
propriétaire d’une petite maison à La Chapelle- Près- Sées, effectuera
« la biographie du légume ».
Histoire, géographie, géologie, histoire de l’art, littérature, tout est
convoqué afin
de raconter le légume, sa vie son oeuvre, sa symbolique, son rôle dans les
assiettes et les consciences.
Du cardon aux topinambours en passant par le panais, mais aussi les
tomates, le
petit pois, la carotte, le chou, ces légumes serviront de prétexte à se réjouir
de leurs histoires
et de leurs saveurs.
Et puis ce noyau dur de l’origine – Tabesse, Onfray, Champérard, Bloch
Dano- se fortifie
des énergies locales et régionales sollicitées par nous :
producteurs de viande de race
normande, de cidre, de fromages, boulangers, directeurs, professeurs et
élèves de lycées
hôteliers, restaurateurs d’Argentan ou d’ailleurs, et toutes les bonnes
volontés .
Comment ?
En donnant. Du temps, de l’énergie, du travail, de la proximité, de l’argent
aussi si l’on veut,
si l’on peut. Tout ce qui contribue à la synergie de l’Up est bienvenu.
A l’issue du cours des
sept lundis, la mairie d’Argentan met à notre disposition sa salle de
réceptions pour goûter et
partager ce qui aura été apporté.
J’aime ce proverbe manouche qui dit
« tout ce qui n’est pas donné est
perdu souvent "
cité par mon ami Patrick Bouchain, l’architecte que nous allons retrouver
plus loin.
Le principe de l’Up ? Le bénévolat. Tous ceux qui interviennent dans ce
dispositif argentanais le
font gratuitement.
Dans un monde libéral et marchand où tout s’achète, se vend, se monnaie,
la seule résistance, c’est la gratuité.
Nietzsche écrivait : « ce qui s’achète est de peu de
valeur ».
De fait, la valeur se manifeste ailleurs. Notamment dans le don, autrement
dit dans la
cession de ce qu’on l’on a afin, pour celui qui donne, d’être plus et mieux.
Enfin : Où allons nous ?
Vers un lieu culturel ouvert, un genre de jardin potager d’Epicure
construit à partir des plans de Patrick Bouchain, architecte génial et
extravagant, qui
représentait cette année la France à la Biennale d’Architecture de Venise.
Il se propose de
penser un bâtiment à même de recycler d’anciennes techniques de
constructions rurales
normandes – la meule, le sol en terre battue, le chôme…-, des produits
atypiques – le déchet
devenu valeur d’un monde alternatif …-, d’actuels savoir faire tribaux
africains – le pisé, les
terres préparées- sur le lieu même de « jardins dans la ville ».
L’une de ses assistantes fera de ce bâtiment appelé à devenir une
construction de référence
dans le monde architectural le sujet d’un mémoire universitaire.
D’ores et déjà une équipe
d’architectes travaille sur ce projet. Des croquis, des dessins, des schémas
existent déjà.
Patrick Bouchain pense que l’ensemble pourrait être inauguré pour le
dernier cours de l’Up du
goût – en juin prochain … Budget prévu : 50.000 euros.
Nous n’avons pas un sou vaillant,
mais nous les trouverons.
Ce bâtiment construit autour d’un foyer entretenu en permanence , pensé à
partir des
cuisines des abbayes romanes, s’agencera donc autour d’une immense
marmite dans laquelle
se fera une soupe populaire gratuite – avec les légumes du jardin.
A terme, nous prévoyons un
restaurant solidaire – du type « L’assiette de tous les pays » à Caen- afin de
recycler un
public en difficulté semblable à celui des « Jardins dans la ville ».
Un bar à tapas, ou une
cuisine conviviale y serait servie, payante cette fois ci, mais modeste.
Le lieu servirait donc à
manger, mais aussi à exposer des artistes oubliés par les circuits officiels, à
des rencontresdébats,
des lectures de poésie, des soirées cinéma. Des dîners pourraient s’y donner
avec les
représentants des communautés d’origines étrangères habitant Argentan.
On pourrait, par
exemple, imaginer une rupture collective du jeune des musulmans avec
toutes les populations
désireuses de partager ces moments là. Même chose avec les autres cuisines
du monde.
Cette Université Populaire du goût d’Argentan appartient à ceux qui s’en
emparent.
Elle
sera ce que chacun en fera. Son succès sera celui de tous.
Le lieu agira comme une «guinguette sèche » - l’Orne passe trop loin, pas
assez au bord…- pour créer des occasions
nouvelles de convivialités dans la cité. Le jardin deviendra un
conservatoire de fruits et
légumes. En partenariat avec Madame Dorléans et le jardin de Saint-Pierre-
sur- Dives nous
plantons et semons des variétés oubliées, perdues et collectées grâce à sa
patience depuis plus
de vingt années.
Alain Richer, qui enseigne l’art des jardins et en crée ici ou
là sur toute la
planète – notamment chez un maharadja…- présidera aux destinées du
nôtre !
Déclarons donc ouverte cette première séance de l’Université Populaire du
goût d’Argentan.
Michel Onfray.
à suivre...
Tags : jardin, argentan, gout, legume michel onfray
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Commentaires
Merci pour la Signature " DE CE qu'il y a au dessus"...
C'est meme difficile à Croire tellement c'est" Humain!"
De l'ordre de" l'Utopie" et pourtant c'est la Réalité...
Merci Gingko, tu signes mon billet! et que vive ces initiatives si libres et tolérantes...
J'aurai mille choses à dire.
à Bon Entendeur...
Je suis ravi ...
PHILIPPE.
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merci pour ce texte !